Dans son dernier livre, le toujours très éloquent Dominique de Villepin constate que « nous sommes entrés dans un nouvel âge de fer ». Sous nos yeux se dessine une géographie inédite de la puissance, tracée à l’encre des « forces brutes » qui ont si souvent rythmé l’histoire d’une grammaire belligène. L’ancien Premier ministre français se réclame volontiers du gaullisme, mouvance plurielle riche d’enseignements.
En 1934, celui qui n’était alors que lieutenant-colonel publiait Vers l’armée de métier, ouvrage dans lequel il appelait à la création d’une force professionnelle afin de répondre aux menaces que laissait planer le régime d’acier de Berlin sur l’Europe et sur la France. Les Éditions Perrin en proposent aujourd’hui une réédition, « vraie œuvre littéraire » pour reprendre les mots d’Hervé Gaymard, ancien ministre et éminent connaisseur de l’Homme du 18 Juin, qui a accepté de la présenter et de l’annoter.
« La démarche de Charles de Gaulle est déductive et réaliste, dépourvue d’idéologie, nourrie d’Histoire, pétrie de bon sens […] » écrit-il. Elle se veut également un antidote au fait que « la guerre a disparu de l’horizon mental des Français. » Nous pourrions facilement ajouter « et des Occidentaux ». Le tocsin russe qui retentit dans l’aube ukrainienne du 24 février 2022 n’était pas une anomalie, mais un retour à une normale. De Gaulle n’écrivait-il pas que « la guerre constitue, peut-être, dans l’activité générale, un inéluctable élément, comme la naissance et comme la mort […] ». La connaître ne signifie pas l’aimer, mais être en mesure de l’intégrer au logiciel des affaires humaines. L’auteur la maîtrisait, autant sur le plan intellectuel que dans le « brouillard clausewitzien de la guerre » — ce qui est en fait un caractère aussi trempé que rarissime. L’histoire est une arme essentielle sur le champ de bataille, parce que « c’est par l’histoire de ses légions qu’on peut le mieux comprendre Rome. ».
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