De l’utilité de la baïonnette

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Figurine King & Country NA298 – Charge! – marchant avec le “Union Jack” en arrière-plan.
Je suis un passionné d’histoire militaire et il en découle que je raffole de parcourir les musées consacrés à ce sujet. Lorsque j’effectue ces visites, je me sens toujours un peu mal à l’aise à la vue des baïonnettes ayant fait partie de l’équipement des valeureux soldats dans le passé. Pour tout dire, elles m’inspirent la crainte de cette douleur qu’elles ont pu causer et à laquelle elles peuvent toujours être associées dans la geste militaire.

Selon un article récent et fascinant paru dans The Journal of Strategic Studies sous la plume de John Stone, il appert que ma disposition à l’égard de cette arme n’est pas incongrue puisque les combats à la baïonnettes ont été bien peu fréquents sur les champs de bataille de l’histoire et les blessures qu’elles ont infligées furent infimes par rapport aux autres causes. Par exemple,

« Bayonet fighting during the First World War was […] a rare event, judging from statistics associated with First US Army’s Operations in Europe. Of the 224,098 casualties requiring hospital treatment, a mere 235 soldiers (0,1 per cent) presented with bayonet wounds. » (p. 1028).

J’aurais pourtant été porté à croire le contraire…

Selon Stone, le vainqueur de l’épreuve de courage qui entoure l’utilisation de la baïonnette est celui dont la trempe morale est la plus solide.

On ne devrait donc pas mesurer l’efficacité de la baïonnette aux dommages physiques qui accompagnent son utilisation, mais sur l’effet moral qu’elle procure à ses utilisateurs.

Je réalise donc maintenant que je suis loin d’être le seul à vouloir m’éloigner de ces objets synonymes de douleur psychologique plutôt que physique.

Comme quoi elles remplissent bien leur mission.

The Poilu, true hero of WWI

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FW149 Ready to Repel by King & Country

La version française de ce billet suit.

Dr. William Philpott of King’s College London – who specializes in the history of World War I, of the French army and British strategy – is one of my favorite historians.

In one of his past articles, “France’s Forgotten Victory” published in The Journal of Strategic Studies, he came to a conclusion that struck me:

It was not the independently minded and dilatory British, or the tardy and brash Americans who won the war for the Entente, but the resilient, determined French, who refused to give in in the face of invasion and national disaster.

With brio, Professor Philpott articulates convincing arguments about the fact that the French poilus are the true heroes of the First World War. Their contribution has visibly been occulted in historiography and public awareness.

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William Philpott, professeur au King’s College de Londres – qui se spécialise en histoire de la Première Guerre mondiale, de l’armée française et de la stratégie britannique – est l’un de mes historiens favoris.

Dans l’un de ses articles passés, intitulé « France’s Forgotten Victory » (la victoire oubliée des Français) dans The Journal of Strategic Studies, il en arrive à une conclusion étonnante mais révélatrice :

« Ce n’est pas le soldat britannique retardataire indépendant d’esprit, ni les Américains tardifs et impétueux qui ont remporté la guerre pour l’Entente, mais plutôt les Français déterminés et résistants, qui ont refusé d’abdiquer devant la menace d’invasion et de catastrophe nationale. »

Avec brio, le Professeur Philpott avance des arguments solides à l’effet que les poilus français sont les véritables héros de la Première Guerre mondiale. Leur contribution a visiblement été passée sous silence dans l’historiographie et l’imaginaire populaire.