« L’invasion de l’Ukraine par la Russie complique les choses pour Xi Jinping » – Jean-Pierre Cabestan

Source: Financial Times

Dans la foulée de ma recension de son dernier livre, le sinologue réputé Jean-Pierre Cabestan, qui est professeur de sciences politiques à la Hong Kong Baptist University, a généreusement accepté de m’accorder une entrevue. Étant donné sa longueur, j’ai décidé de la publier en deux parties.

Puisqu’il y est question de la Chine et de l’impact de la guerre en Ukraine sur les relations entre Pékin et Washington, ses observations mettent en lumière une dynamique incontournable dans les relations internationales.

Voici le contenu de notre échange.

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Professeur Cabestan, dans votre excellent livre Demain la Chine : guerre ou paix?, vous évoquez souvent la notion de « passion et de poudre ». Nous en observons actuellement une manifestation ailleurs sur le globe, en Ukraine. Quelle est votre lecture de l’attitude de la Chine dans la guerre initiée par Moscou en Ukraine? Pensez-vous que l’attitude du Kremlin vient brouiller les cartes pour Xi Jinping?

L’invasion de l’Ukraine par la Russie complique les choses pour Xi Jinping, et pas seulement à propos de Taiwan. Elle montre que le passage du seuil de la guerre a de multiples conséquences, souvent incalculables, et peut déclencher une escalade, voire une nucléarisation du conflit, également difficilement prévisible et contrôlable.

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L’histoire comme arme géopolitique

Lors d’une récente discussion, un ancien haut-gradé des Forces armées canadiennes me faisait prendre conscience à quel point la géopolitique nous affecte. Quotidiennement. Par exemple, au niveau des chaînes d’approvisionnement, lesquelles dépendent largement du transport maritime. Quand on sait que la principale route commerciale est celle qui relie la Chine à l’Europe par le canal de Suez, il y a tout lieu de s’intéresser de beaucoup plus près à ce qui se passe en mer de Chine. Mais comme c’est moins visible et criant que le bruit de bottes qui se font entendre actuellement aux frontières de l’Ukraine ou de l’exaspération découlant des négociations corsées avec l’Iran, on y prête moins attention.

C’est justement cet aspect inaudible des relations internationales que l’historien et spécialiste en géopolitique Thomas Gomart s’emploie à illustrer dans son dernier livre, Guerres invisibles : Nos prochains défis géopolitiques (Tallandier) dont je viens de terminer la passionnante lecture.

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